Le dopage en question.
Cette fois la coupe est pleine, pas celle de la victoire que l'on
soulève avec délice mais celle qui déborde d'injustices, de
conneries et d'amalgames hâtifs largement déversés.
Mon amour propre de cycliste amateur vient encore d'essuyer les
remarques désobligeantes de piliers d'un comptoir qui ne
semblait pourtant pas menacer de s'effondrer, noyant leur détresse
du sport pourri dans l'apéritif anisé. Ce qui vous en
conviendrz est la place idéale pour donner des leçons quant à
la dangerosité des produits dopants, la triche, le risque de dépendance
à ces mêmes substances ou l'éthique au sens large.
C'était un fois de plus et sans doute une fois de trop. Si seuls
les clients de nos beaux cafés se permettaient ces confusions,
l'honneur seraient sauf et l'incident clos, mais la population y
adhère largement et c'est parfaitement compréhensible. Sur le
dopage tout a été vu, dit, entendu et surtout des inepties,
melant à l'envie le vrai au faux, la réalité aux éxagérations
faciles.
Dans la période de l'explosion en plein vol de la formation
Festina, le téléphone Arabe a disfonctionné à la perfection,
puis les affaires se sont succédés y compris chez les amateurs.
Des livres sont aparus étalant la navrante vérité, la
poisseuse réalité et souvent en les refermant, j'avais la nausée
à la révélation de ce monde dont je me croyais proche. J'étais
triste de découvrir le revers de cette médaille rutilante, si
loin des sensations pures et dures de l'effort et des plaisirs
ressentis au guidon quand l'organisme autorise toutes les audaces.
S'il est vrai que le dopage touche les amateurs, il n'est
heureusement pas la règle et le fait de porter un chapeau trop
large en lieu et place des brebis galeuses me révulse moi et mes
amis qui vivent leur passion sur deux roues, qui souffrent sang
et eau en limant du bitume, qui bravent la pluie cinglante et le
froid piquant pour quelque parcelle de bonheur trop vite évanoui
ou pour une gloriole lors d'une coursette de clocher. Ceux qui
imaginent une aide pharmaceutique toute puissante derrière
chaque cycliste seraient bien inspirés de se joindre à nous
pour un entraînement hivernal par -5° C pour une balade de cent
bornes. Certes, le cyclisme n'à pas volé sa réputation au
point d'en devenir institutionnel et même culturel chez les pros
et certains amateurs.
Pendant de longues décennies les autorités compétentes, les fédérations
ou les organisateurs dormaient du sommeil du juste. Le mois de
juillet 98 a sonné le bruyant réveil, après la coupe du monde
quand même, faut pas charier. L'invisible devint intolérable et
l'on pensait à tort rattraper le temps perdu d'un tour ... de
France.
La lutte sera longue, inégale, la bête évolue sans cesse et
joue avec un coup d'avance. Alors oui je me dope à l'optimisme,
je me shoot à l'espoir de voir mon sport redevenir noble, je
veux planer devant des victoires (propres) d'anthologie devant
des baroudeurs au panache démesuré. Si l'on veut lutter, la
logique voudrair que TOUS les sports soient concernés afin d'être
efficace et juste, ce qui n'est visiblement pas le cas. Zidane a
avoué prendre de la créatine il y a quelques années ? Une péripétie
qui n'emeut personne. Des analyses de sang révelant des taux d'hématocrytes
trop élevés chez les joueurs de Parme ? Atonie générale. Le
foot est une poule aux oeufs d'or, personne ne la tuera, on sait
depuis la fable qu'elle ne renferme pas de trésor, elle le
distile au fil des saisons. Pour les J.O., outre les cas avérés,
certains autres sont éminemment troublants à l'image d'une athlète
nécessitant une aide afin de rejoindre ses skis et opéré
seulement quelques mois avant d'aligner les performances avec un
genou en croustille. Le gain de masse musculaire de l'ordre d'une
dizaine de kilos par an semble être une nouvelle norme.
J'aimerai assez que l'on m'explique comment un skieur qui
s'explose un ligament pendant l'épreuve parvient à rejoindre le
ligne, qui plus est correctement classé. Il serait pertinent de
demander à une clinique spécialisée combien de patients
atteints aux ligaments ont pu poursuivre leur effort plus de
trois mètres avant de s'effondrer en hurlant de douleur. Que
dire de l'intrview d'un hurluberlu aux yeux version "plein
phares", un débit de mots à faire pâlir l'Amazone et des
tics à se faire retourner De Funes dans sa caisse de sapin. Le
système pileux de certaines skieuses demeurent un mystère et
laisse pantois Demis Roussos lui même. Les journalistes, eux, ne
voient rien, trop occupés à s'extasier devant le courage et
l'abnégation fabuleuse de ces athlètes, pas plus que le CIO.
Tout baigne dans le monde du sport business.
Alors, à l'instar de Deproges déclarant " je militerai
pour SOS racisme le jour ou l'on ajoutera un S à racisme",
je croirai à la lutte antidopage le jour ou dans tous les sports
le fléau sera traqué. Quant aux joyeus drilles à la langue
toujours levé, qu'ils troquent leurs journaux à scandales
contre "Besoin de vélo" de Paul Fournier ou "Je
pars demain" d'Eric Fottorino, deux livres à la fraîcheur
bienfaisante qui replongent le lecteur au coeur des sensations
pures, vraies, basiques, presque bestiales offertes par notre
sport..
Michel.
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